Les Etats-Unis, superpuissance

Depuis la fin de la guerre froide, les Etats-Unis sont la seule superpuissance politique et militaire, une suprématie qui leur impose une vision géoplanétaire, et leur donne un rôle d’arbitre dans les affaires du monde....

 


I – L’hyperpuissance militaire et économique

1) Une formidable puissance militaire au service d’une vision géostratégique du monde.

  • Depuis la fin de la guerre froide, les Etats-Unis sont la seule superpuissance politique et militaire, une suprématie qui leur impose une vision géoplanétaire, et leur donne un rôle d’arbitre dans les affaires du monde. Pour maintenir leur hégémonie, ils disposent de forces armées, mais ils doivent aussi s’appuyer sur un système d’alliances et de partenaires.
  • Leurs dépenses militaires sont à l’origine d’un complexe militaro-industriel qui associe le ministère de la Défense (Pentagone) aux entreprises de construction aéronautiques et électroniques fabriquant les armements dont les Etats-Unis sont les premiers exportateurs mondiaux.

2) Une exceptionnelle capacité productive

  • L’économie étatsunienne est de loin la première du monde. Portée par un marché intérieur de près de 290 millions de consommateurs dont le pouvoir d’achat est très élevé, mais largement ouvert sur l’extérieur du fait du libre-échange généralisé, elle doit sans cesse s’adapter à la conjoncture et innover pour ne pas être débordée par la concurrence extérieure.
  • L’industrie américaine s’identifie à quelques gigantesques entreprises leader dans leur branche d’activité. Mais plus que la production de biens, même de haute technologie (informatique, biotechnologie), ce sont des activités de services, notamment les plus sophistiquées (recherche-développement, conception, activités financières), concentrées dans certains lieux (CBD, parcs de recherche) qui portent l’économie. Dans cette économie « postindustrielle », les services occupent 75 %  de la population active et créent plus de ¾ des richesses.
  • Les Etats-Unis sont aux tout premiers rangs mondiaux pour les grandes productions agricoles dont ils sont les premiers exportateurs. Même s’ils ne peuvent faire des exportations de céréales « l’arme alimentaire » qu’ils avaient brandie dans les années 1970 et 1980 contre l’Union soviétique, ils font de leurs exportations au titre de l’aide alimentaire un puissant moyen d’influence sur les pays en développement et négocient durement à l’OMC avec les autres pays exportateurs, tout en cherchant à imposer partout les OGM.
  • L’efficacité de l’agriculture tient à son intégration dans un complexe agro-industriel qui va de la fourniture des biens et services nécessaires aux exploitants agricoles jusqu’à la transformation et la commercialisation des produits agricoles. L’agrobusiness est l’une des plus puissantes filières productives américaines, employant 20 millions de personne et contribuant de 15 à 18 % du PIB.

3) Une puissance financière dominante

  • Les Etats-Unis dominent la scène boursière internationale, le Stock Exchange est la première place boursière du monde, loin devant le Kabuto-cho japonais. Chicago est la première place mondiale pour les marchés à terme sur les matières premières, et fixe les cours mondiaux, notamment ceux de céréales. New York dispute à Londres la première place pour les activités des banques d’affaires qui gèrent les fortunes privées et capitaux des monarchies pétrolières, et sont les maîtres-d’œuvre incontournables des grandes fusions d’entreprises à l’échelle mondiale.
  • Le dollar est la monnaie de référence ; la moitié des transactions commerciales dans le monde est libellée en dollars et il est considéré autant comme moyen d’échanges que comme valeur refuge pour les particuliers.


II – Les Etats-Unis fascinent le monde

1) Une exceptionnelle activité migratoire

  • Plus que jamais, les Etats-Unis sont un des « havres » du monde. L’accélération des flux d’immigrants observée depuis un quart de siècle a contribué pour plus de 30 % à la croissance démographique. C’est une source permanente d’enrichissement humain : la législation migratoire est assouplie pour attirer des étrangers qualifiés. Ce « brain drain » colle à la demande : 195 000 visas « HIB » en 2 000 soit deux fois moins en 2 002.
  • L’immigration bouleverse la composition ethnique du pays. Aux grandes vagues européennes de la première moitié du XXe siècle, ont succédé celles en provenance des pays en développement qui représentent depuis une vingtaine d’années 85 % des immigrants. Les gros contingents sont fournis par le Mexique (24 %), les Caraïbes et le reste de l’Amérique latine, mais les immigrants asiatiques arrivent de plus en plus nombreux, les Chinois, les Vietnamiens… débordant désormais les Philippins. Pour la première fois, en 2 000, les Hispaniques constituent la première minorité des Etats-Unis, avant les Noirs.

2) Les séductions de la « puissance douce »

  • La puissance culturelle, ou « puissance douce », s’exprime à travers la culture dite populaire, largement produite et diffusée par une poignée de grandes firmes mondialement connues : McDonald’s, Coca Cola ou Pepsi Cola, Disney, et plus encore par les grands médias de l’information et de la communication. Musique, modes vestimentaires décontractées « à la californienne », habitudes alimentaires (du hamburger aux « soft drinks » plus ou moins allégés), séries télévisées (soap operas et sitcoms), films à gros budget, parcs à thème sont autant de produits conçus pour plaire au plus grand nombre et destinés à être vendus dans le monde entier. Cette puissance irrésistible de diffusion s’exprime dans les chiffres sur les échanges audiovisuels avec le reste du monde : les Etats-Unis exportent en valeur dix fois plus qu’ils n’importent, l’Union européenne en absorbant 80 %.
  • L’influence des élites culturelles n’est pas moins grande. Elle repose sur une exceptionnelle infrastructure d’universités, de bibliothèques, de musées et de fondations. Ecrivains, journalistes, artistes contribuent plus que d’autres à la diffusion des valeurs américaines, et singulièrement de l’idéologie capitaliste et libérale. Ce sont des Etats-Unis que partent les modes de pensée, conformistes ou non vis-à-vis de l’idéologie dominante.
  • Cette domination culturelle est portée par la place de l’anglo-américain, qui inonde de ses néologismes les autres langues et qui s’est imposé comme le vecteur quasi-exclusif des échanges internationaux commerciaux, scientifiques et diplomatiques. Elle n’est pas sans susciter des inquiétudes dans les autres pays qui prétendent eux aussi participer du « village culturel mondial ».

3) Une idéologie capitaliste dominante

  • Les Etats-Unis sont le laboratoire du capitalisme libéral. Les économistes et les hommes d’affaires américains ont donné au monde les méthodes modernes de travail et de gestion, les techniques de publicité, de vente, de crédit. Depuis une vingtaine d’années, l’ultralibéralisme américain inspire les politiques économiques dans le monde : privatisations et désengagement de l’Etat, remise en cause de l’Etat providence, libre-échange généralisé, pressions sur les grandes organisations internationales (FMI, OMC) pour qu’elles imposent le modèle américain dans le monde.

III – L’incontournable marché américain

1) Le premier commerçant de la planète

  • Les Etats-Unis sont à la fois les premiers exportateurs et les premiers importateurs du monde. Mais leur influence tient d’abord à l’importance de leurs importations (22 % du total mondial en 2 001), un des moteurs du système économique mondial. Cette position dominante leur permet d’imposer de fait les règles du jeu du commerce international.
  • Près de 2/3 du commerce se font avec les pays développés et de plus en plus avec les NPI, aux premiers rangs desquels se trouvent le Mexique, partenaire désormais privilégié dans le cadre de l’Alena, et les « dragons » asiatiques (Taiwan, Corée du Sud, Malaisie, Chine). En quelques années, la Chine est devenue le troisième fournisseur des Etats-Unis et dégage un excédent commercial supérieur à celui du Japon.
  • 80 % des produits échangés sont des produits manufacturés, mais les Etats-Unis sont aussi des exportateurs de produits agricoles et de services (19 % des exportations mondiales). Gros consommateurs d’énergie, ils doivent acheter plus de la moitié de leurs besoins en pétrole, une dépendance aux implications géostratégiques majeures. Les importations de produits bruts concernent aussi les denrées agricoles, tropicales et les minerais.

2) Le premier déficit du monde

  • En ouvrant largement leurs frontières, les Etats-Unis ont fait le choix délibéré d’abandonner des pans entiers de leur système productifs ou de le transférer à l’étranger et d’y substituer des importations, quitte à laisser filer un déficit commercial abyssal. C’est une politique qu’ils sont les seuls à pouvoir mener dès lors  que la valeur de leur monnaie n’est pas liée au niveau de la balance des paiements américaine, mais à la confiance qu’ont les détenteurs de dollars dans l’économie américaine.
  • Les détenteurs étrangers de dollars, qu’ils soient particuliers, firmes ou Etats, n’ont cesse de placer leurs excédents aux Etats-Unis. C’est ainsi que le gouvernement américain finance son déficit budgétaire en plaçant chaque année des bons du Trésor auprès des principaux détenteurs de dollars, le Japon (1/3 des bons émis par le trésor jusqu’en 2 001), la Chine et Hong Kong, l’Allemagne, la Corée du Sud et les membres de l’OPEP.

3) Les Etats-Unis au centre des flux de capitaux

  • Le bilan des IDE signale la place fondamentale des Etats-Unis dans les stratégies d’investissement des FTN, qu’elles soient américaines ou étrangères. Les Etats-Unis représentent le quart des IDE dans le monde, leurs investissements équilibrant d’ailleurs les investissements des étrangers sur leur territoire.
  • Géographiquement, les investissements américains restent fondamentalement orientés vers l’Europe (plus de la moitié) et leurs voisins immédiats, le Canada et le Mexique. Les firmes américaines sont présentes dans tous les secteurs de l’économie mondiale, dans l’exploitation des ressources naturelles comme le pétrole, dans l’industrie et les services, depuis la banque et les assurances jusqu’à l’immobilier. Les Etats-Unis sont  aussi le tout premier pays d’accueil des IDE. Les Européens, notamment les Britanniques qui, par ailleurs relaient d’importants fonds d’origine moyen-orientale, dominent avec plus de 2/3 des IDE, pour l’essentiel investis dans l’industrie et les services.

 

IV – Les fragilités de l’hyperpuissance


1) Une économie puissante, mais des faiblesses structurelles

  • Le libéralisme économique a des conséquences douloureuses : des fractures sociales et géographiques. En effet, si le système libéral favorise les initiatives et l’enrichissement individuel, la prospérité n’est pas pour tous : le 1/5 le plus riche de la population dispose de 50 % des revenus des ménages (45 % en 1 985) ; le 1/5 le plus pauvre n’en a que 3,5 % (4 % en 1985). Les retournements brutaux de la conjoncture laissent le nombre de personnes marginalisées, dépendant d’une aide sociale chichement mesurée, premières victimes des politiques de restriction des budgets sociaux. 10 à 12 % de la population vivent sous le seuil de pauvreté (chômeurs, personnes âgées, familles monoparentales…). La drogue et la violence font des ravages chez les jeunes.
  • Le choix du libre-échange sans entrave a entraîné l’abandon de pans entiers de l’industrie nationale. Les délocalisations à l’étranger et les importations massives de produits manufacturés expliquent la grande précarité de l’emploi salarié. Elles déstabilisent les villes et les régions qui ne parviennent pas à s’intégrer dans « la nouvelle économie ».
  • Les restrictions budgétaires, imposées par la baisse des impôts, ont fragilisé les services publics. Services sociaux, logement, éducation, infrastructures et transports en commun souffrent particulièrement. Les budgets des villes et des Etats ne suivent plus. Un Etat comme la Californie, pourtant le plus riche du pays, est en quasi-faillite. La privatisation imprudente de l’électricité a entraîné un effondrement de son système de distribution et de gigantesques pannes de courant.

2) Le modèle américain contesté

  • A l’intérieur, il y a moins d’unanimité que l’on croit et des pans entiers de l’opinion s’interrogent, contestent les choix politiques, économiques, sociaux et environnementaux de l’administration au pouvoir à Washington. Plus graves, les Etats-Unis ne parviennent pas à intégrer convenablement leurs minorités, et notamment la plupart des Noirs, qui demeurent les laissés-pour-compte du « rêve américain ». Il y a là un facteur de déstabilisation sociale d’autant plus dramatique que les minorités s’affrontent, comme le montrent les émeutes dans les quartiers pauvres de Los Angeles, opposant émigrés asiatiques, Latinos, et Noirs.
  • A l’extérieur, au-delà de la guerre larvée menée par les invisibles réseaux de terrorisme international, les Etats-Unis doivent compter avec les hésitations de certains de leurs plus vieux alliés qui n’acceptent pas un retour à l’unilatéralisme, que celui-ci prenne la forme d’interventions militaires (Irak en 2 003) ou du refus de Washington de ratifier certains traités internationaux comme celui de Kyoto sur la réduction des énergies polluantes.

3) Une Amérique dépendante ?

  • Les Etatsuniens sont les premiers consommateurs et importateurs de pétrole de la planète. Ils dépendent de l’étranger pour la moitié de leurs besoins de pétrole ; cette dépendance pétrolière constitue une faiblesse géostratégique.
  • Il faut aussi rappeler à quel point l’économie américaine est dépendante de ses créanciers, c’est-à-dire de tous ceux qui – pour le moment – acceptent de financer les déficits abyssaux des Etats-Unis vis-à-vis de l’extérieur. Les Etats-Unis sont devenus les premiers débiteurs de la planète. Ils vivent à crédit au-dessus de leurs moyens. Pour combien de temps encore ?

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